L’annonce de la reprise de l’école, le 11 mai, inquiète les enseignants comme les inspecteurs, tant subsistent de doutes et d’incertitudes sur ce que représentera concrètement sa mise en œuvre progressive.
Notre organisation syndicale, avec les autres organisations de la FSU, a clairement exprimé que la priorité devait rester la santé de l’ensemble de la population. Nous ne pourrions admettre que des nécessités économiques puissent suffire à mettre en danger des élèves, des enseignants et par là-même des familles entières. Nous ne pourrions accepter que des agents, quelles que soient leurs missions, soient amenés, du fait de leur âge ou de situations de santé particulières, à prendre des risques encore plus grands.
Or il sera difficile de garantir que les conditions sanitaires indispensables soient réunies. Il reste encore, aujourd’hui, cinq semaines après l’organisation de classes accueillant les enfants des personnels essentiels à la gestion de la crise sanitaire, des situations où les inspectrices et les inspecteurs doivent intervenir pour obtenir que les locaux soient désinfectés régulièrement, que du gel hydro-alcoolique et des serviettes à usage unique soient mis à disposition. La fourniture de masques est très irrégulière sur l’ensemble du territoire et reste insuffisante.
Ces conditions de protection sanitaire, déjà difficiles à assurer aujourd’hui, comment pourrions-les garantir si le nombre d’écoles et de classes ouvertes devait augmenter, si les élèves devaient utiliser des transports et la cantine ? Comment contraindre, tout particulièrement avec de jeunes enfants, le respect de distances et des gestes barrières ?
La fourniture de masques devra être assurée pour l’ensemble des personnels. Pour les réunions et rendez-vous, le télétravail doit continuer à être privilégié : le retour au présentiel empêcherait les agents les plus fragiles d’y participer.
Indépendamment de ces questions de sécurité, c’est l’organisation même des apprentissages qui posera problème. Comment des enseignantes et des enseignants qui assureront la scolarité en présentiel pour une partie de leurs élèves pourront aussi organiser l’enseignement à distance pour les autres élèves ? L’amélioration offerte à certains se fondera-t-elle sur une détérioration pour d’autres ?
Notre inquiétude porte aussi sur la manière avec laquelle, faute d’un cadre national suffisant, des initiatives locales pourraient être prises qui renforceraient encore les doutes tant sur la sécurité sanitaire que sur l’organisation pédagogique. De même des protocoles précis devront être fixés en cas de suspicion de contamination dans une école.
Nos obligations professionnelles incluent celles de la protection des agents sur qui nous avons autorité. Nous ne pourrons accepter de donner des consignes qui compromettraient la santé des personnels et celle de leurs élèves. Nous ne pourrons accepter de substituer des éléments de langage faussement rassurants à une garantie effective de la meilleure sécurité sanitaire possible.
Les Lilas, le 19 avril 2020