La FSU s’adresse à Gabriel Attal au sujet de la scolarisation des élèves en situation de handicap.

Monsieur le ministre,

La FSU demande la mise en œuvre de mesures d’urgence ainsi que l’ouverture de discussions pour les mesures de plus long terme sur les conditions de la scolarisation des élèves en situation de handicap.

La situation actuelle est en effet intenable, l’école ne parvient plus à accueillir comme il se doit les élèves qui lui sont confiés, c’est inacceptable. Il y a urgence selon nous à donner les moyens pour que l’école inclusive fonctionne. Allègement des effectifs, moyens humains supplémentaires, abandon des PIAL, reconstitution des réseaux d’aides, places en établissements spécialisés, véritable statut pour les AESH, formation, accompagnement des équipes… rien de cela n’est mis en place, laissant les personnels démunis, souvent en situation de souffrance professionnelle comme le montrent les nombreuses remontées via le registre santé et sécurité au travail. La dernière enquête sur le climat scolaire de Benjamin Moignard et Eric Debarbieux pour l’Autonome de solidarité montre que les enseignantes et enseignants sont à un point de rupture sur la question de l’inclusion. Il est urgent de prendre en compte cette ultime alerte.

La Conférence Nationale du Handicap en avril dernier qui a notamment acté la mise en œuvre de l’acte 2 de l’école inclusive avec la mise en place du statut d’emploi des ARE et la transformation des PIAL en pôle d’appui à la scolarité, ne vont faire qu’aggraver la situation. Les dernières réunions avec votre cabinet sur cette question n’auront pas rassuré la FSU qui se montre très critique vis à vis de nombre de mesures qui ne répondent en rien aux besoins des élèves et des personnels.

Il est urgent de prendre la mesure de ce qui se passe actuellement dans nos écoles et dans nos établissements et d’écouter la profession qui est en demande forte sur ce sujet.

En urgence, nous exigeons l’abandon des PIAL et que des places soient ouvertes dans les structures spécialisées. Le ministère doit en effet cesser de dévoyer le principe de l’école inclusive, de l’instrumentaliser pour réduire les coûts, via la fermeture de structures spécialisées ou encore la mutualisation des moyens via les PIAL. Dans les faits, difficultés cognitives, troubles de comportement, handicap : tout est mis sur le même plan.

Certain·es élèves, inclus·es dans des classes ordinaires sans moyens afférents peuvent ainsi se trouver en situation de souffrance, comme d’autres élèves de la classe et comme les personnels, lorsque le travail est empêché. La situation étant de plus en plus dégradée, la FSU accompagne les collègues face aux difficultés qu’ils et elles rencontrent sur le terrain et intervient devant les autorités compétentes afin que des solutions soient mises en place dans l’intérêt des collègues, des élèves et des familles. Cela peut nécessiter des moyens d’accompagnement mais aussi que des places soient disponibles dans les structures spécialisées. La FSU dénonce et s’oppose aux fermetures d’établissements spécialisés et d’enseignements adaptés, ainsi qu’à la baisse de leurs moyens. Elle exige que les politiques des ARS et du Ministère de l’Éducation nationale en termes d’offres se fassent en fonction des besoins et non d’une politique de réduction des coûts. Elle s’oppose à la dégradation des services d’aide infanto-juvénile (médical et social), et demande leur développement pour accompagner les enfants, leurs familles et apporter les soins nécessaires aux élèves les plus en difficulté.

La présence des AESH peut être un levier pour la réussite de l’inclusion. Il est impératif que les élèves ayant une notification bénéficient effectivement de cette aide humaine. Pour éviter l’isolement et la souffrance des professionnel·les face à la diversité des situations particulières, face au manque de moyens et aux injonctions paradoxales et/ou contradictoires, il est nécessaire de réaffirmer leur expertise dans l’exercice de leur métier. Il faut renforcer le nombre d’enseignant·es spécialisé·es et obtenir à l’initiative des personnels des temps institutionnels de construction collective des outils et dispositifs pédagogiques ainsi que des temps de concertation en équipe pluriprofessionnelle (y compris les AESH) pour privilégier les regards croisés et faciliter le lien éventuel avec les structures partenaires (CMPP, SESSAD,…). Ces temps sont indispensables et doivent être intégrés dans les obligations réglementaires de services (ORS) et le temps de travail.

Il est nécessaire également de renforcer ces équipes par le recrutement de PSY-EN, d’enseignant·es spécialisé·es, d’infirmier·ères scolaires, AS, CPE… Il faut aussi pourvoir les postes vacants de médecins scolaires et recentrer leur action sur leurs missions prioritaires (visite médicale de la 6ème année de l’enfant…). La scolarisation des élèves dits « à besoins particuliers » ne se pose pas qu’en termes de réparation et de compensation. La vigilance s’impose pour ne pas traduire par des critères médicaux des difficultés d’ordre social ou pédagogique : il faut développer une approche de prévention des difficultés avec du personnel supplémentaire formé à tous les niveaux de la scolarité et dans tous les établissements.

La FSU demande en particulier le développement des formations CAPPEI, la reconstruction des RASED, la création de postes d’enseignant·es surnuméraires dans le premier degré.

Dans le cadre d’un travail de moyen terme, la FSU demande au ministère l’ouverture de discussions fondées sur un état des lieux, appuyé sur l’expression de tou·tes les acteur·trices et visant à envisager les moyens de la réussite de l’inclusion. Les discussions à venir dans le cadre de l’agenda social de l’Acte 2 de l’Ecole inclusive s’inscrivent dans un cadre trop restrictif pour traiter pleinement ces questions.

La FSU défend en effet le principe de l’inclusion sur le temps scolaire et périscolaire, mais ses conditions de mise en œuvre sont trop souvent empêchées car elles s’inscrivent à la fois dans une politique renforçant inégalités et discriminations et dans des budgets insuffisants. Une école inclusive nécessite de créer un environnement favorable aux élèves et à tous les personnels, ce qui nécessite notamment une baisse des effectifs dans les classes.

Pour réussir cette inclusion, il est également indispensable de former les enseignant·es afin de leur permettre de proposer une pédagogie adaptée, d’organiser les apprentissages et d’évaluer les acquis. Il faut conserver une variété de modes de scolarisation y compris dans des établissements spécialisés permettant une meilleure articulation entre le soin et les apprentissages, en fonction des besoins des élèves.

La FSU demande, entre autres, une politique d’accueil et d’accompagnement des élèves et étudiant·es en situation de handicap lors du passage de toute forme d’examens finaux ou en contrôle continu en lycée et à l’université. Cela passe par un recrutement spécifique d’enseignant·es, une mise à disposition de matériel et de personnels en soutien, la présence de lecteur·trice – scripteur·trice, d’aide à la prise de notes à la hauteur des types de besoins. Pour une inclusion sociale et professionnelle de l’élève et de l’étudiant·e, l’ensemble de son parcours de la maternelle à l’insertion professionnelle doit lui donner sens.

La FSU affirme l’éducabilité de toutes et tous. L’inclusion comme la scolarisation dans des établissements spécialisés doit permettre l’accès à la culture commune pour une émancipation intellectuelle, culturelle et sociale des élèves et des étudiant·es.

Je vous prie de croire, Monsieur le ministre, en l’expression des mes salutations respectueuses.

 

Benoît Teste

Secrétaire Général de la FSU